Deux cent cinquante personnes se sont entassées dans la salle de la Maison des syndicats, trop petite pour l’occasion. Les organisateurs, un peu débordés, ont dû au fur et à mesure rajouter des chaises, jusque dans l’entrée de la salle. La mobilisation des opposants à la guerre en Irak s’amplifie donc dans notre département.

Après un court débat sur la situation en Tchétchénie, introduit par un membre du collectif qui en revient, la parole fut donnée à Patricia Latour. Journaliste et écrivain, signataire de l’appel « Pas en notre nom », en solidarité avec les 30 000 artistes et intellectuels étatsuniens qui se prononcent contre la politique de Bush au Moyen Orient, Patricia Latour s’est rendu plusieurs fois en Irak, son dernier voyage datant d’octobre dernier. A partir d’exemples concrets, elle dressa un tableau assez sombre de l’état du peuple irakien, « privé de médicaments, de chlore pour désinfecter les hôpitaux ou pour traiter l’eau ». En Irak, « les enfants meurent par exemple de gastro-entérites, maladies bénignes chez nous ; l’embargo criminel, outre qu’il désorganise totalement le pays, a fait depuis douze ans plus d’un million et demi de morts. Il est responsable de 8000 décès par mois ». Un peuple exsangue, « frappé par une recrudescence de cancers et de leucémies causés par l’utilisation par l’armée américaine d’armes à uranium appauvri, lors de la première guerre du Golfe. Tous les jours ont lieu des raids aériens et des bombardements sur l’Irak ». « Que l’Irak soit une dictature, cela ne fait aucun doute, mais l’embargo fait plus de morts que cette dictature. L’humiliation du peuple irakien renforce le pouvoir dictatorial de Saddam Hussein ».

Vint ensuite le passage en revue des buts de guerre poursuivis par l’administration Bush. Abattre une dictature ? « L’Irak n’est pas la seule dictature, c’est en plus un des rares pays de la région à posséder une constitution. Les USA ne proposent pas d’intervenir en Syrie, en Arabie Saoudite ou au Koweit ». Faire appliquer les résolutions de l’ONU ? « Les USA ferment les yeux sur Israël qui bafoue les résolutions des Nations Unies, occupe des territoires qui ne lui appartiennent pas, et possède en outre l’arme atomique ». Désarmer un Etat dangereux ? « Scott Ritter, ancien inspecteur de l’Unscom, affirme que l’Irak n’a pas reconstitué son potentiel d’armes de destruction massive ramené à zéro ». La vraie raison de l’intervention promise par les USA est selon Patricia Latour, la « volonté de mettre la main sur les immenses ressources en pétrole de l’Irak, deuxième producteur mondial, qui de plus en a nationalisé l’exploitation ». Les Etats Unis, « qui devront importer dans 20 ans, 60 % de leur approvisionnement en pétrole, ont un besoin vital des réserves irakiennes ». « La guerre est aussi un bon moyen pour les USA de relancer son économie, en crise, par la relance de la production d’armement et les investissements à venir pour les entreprises étatsuniennes après la destruction de l’Irak ». C’est donc bien d’une guerre impérialiste dont il s’agit, « une guerre que seule la mobilisation des peuples peut empêcher ».