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Projet de renouvellement urbain durable
27 février 2004
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Monsieur le Maire, chers collègues. Je voudrais dâabord me féliciter de la tenue de cette réunion extraordinaire de notre Conseil Municipal avec à son ordre du jour le projet de renouvellement urbain durable. En janvier, jâen avais effectué la demande, estimant que le minimum de démocratie (je dis bien le minimum) exigeait que le Conseil Municipal soit réuni en séance publique pour débattre et se prononcer avant tout dépôt de dossier auprès du Ministère et de lâAgence Nationale pour le Renouvellement Urbain. Ce minimum est respecté, câest heureux ! Mais il ne sâagit que dâun minimum ! Selon vos propres paroles, ce projet est lâun des trois grands projets en matière dâurbanisme de ces dernières décennies après la mise en uvre des ZUP dans les années 60 et la construction du quartier du Val dâAuron dans les années 80. Et bien, si ce projet est de cette ampleur là, il aurait mérité une information, une concertation, une co-élaboration avec les habitants de Bourges dâune toute autre dimension. Dès le Conseil Municipal dâoctobre dernier, je vous avais fait des propositions à ce sujet. Permettez-moi de me citer : « Organiser les Etats-généraux du logement social à Bourges. Il sâagirait dâimpliquer totalement les Berruyers (au premier rang desquels les locataires HLM) dans la préparation dâun réel projet de renouvellement urbain. En les réunissant par bâtiment, par cage dâescalier, ils sauront dire ce dont ils ont besoin, ils sauront être les experts qui indiqueront ce quâil faut détruire, ce quâil faut rénover, comment réorganiser le bâti, les équipements publics, les circulations. En croisant ces éléments avec les avis des techniciens, des élus, des associations, quelle richesse nous aurions, quel formidable projet nous bâtirions ! » Au lieu de cela, vous avez préféré communiquer à grands renforts dâeffets dâannonce qui nâont fait quâattiser les inquiétudes voire les angoisses et organiser (parce que nous vous avons pressé de le faire) deux réunions de « concertation » bien confuses parce que ne partant pas des problèmes réels vécus par les habitants des quartiers concernés. Sur ce premier point de lâassociation des Berruyers au processus dâélaboration dâun nouveau projet pour la ville, câest déjà un constat dâéchec quâil faut dresser ; câest un premier handicap majeur pour la réussite dâun projet de renouvellement urbain digne de ce nom. Jâen viens maintenant au dossier qui nous est présenté et à la délibération qui nous est proposée. Le diagnostic, la situation de la ville tout dâabord. Je dirai quâil est accablant pour lâéquipe municipale en place depuis maintenant près de 9 ans. Ce diagnostic corrobore totalement ce que je peux dire dans cette enceinte depuis de nombreuses réunions de notre Conseil Municipal : progressivement mais inéluctablement, Bourges est conduite vers le déclin ; le rempart vis à vis de la désertification qui gagne le sud du département est en train de largement se fissurer. La démographie. 3200 habitants perdus entre 1990 et 1999 et la fuite continue (le document parle même de plus de 8000 habitants qui sont partis dans la même période). On parle de 3500 étudiants à Bourges, câest-à-dire le même nombre quâen 1995 malgré la montée en puissance de lâENSI. La population scolaire continue à se réduire avec 7 fermetures de classe à la rentrée prochaine (le plus fort chiffre de toutes les villes de la Région Centre). Lâemploi. Malgré quelques installations, force est de constater la perte de plus de 600 emplois à Bourges dans les derniers mois (pour beaucoup des emplois à forte valeur ajoutée et qui en induisent dâautres) et la défaillance dâentreprises notables. Le logement. Plus de 3000 logements vides sur la ville de Bourges (dont un millier dans le parc HLM). « Lâinadaptation de lâoffre » ne suffit pas à tout expliquer. Bien sûr, vous nâassumez pas toutes les responsabilités de cette situation. Il existe une situation générale avec une politique économique et sociale conduite par un gouvernement que vous soutenez, politique économique et sociale qui sâattaque aux classes modestes et aux classes moyennes, qui sâattaque à tous les fondements de la solidarité dans notre pays. Cette politique fait mal à Bourges, cette politique est dure pour les Berruyers. Il existe aussi, dans cette dernière période, un abandon de lâEtat vis-à-vis de notre ville et notre département, avec un gouvernement qui laisse tomber des projets structurants pour le Cher et ne sâengage quâà minima dans le contrat de site. Il existe aussi une politique municipale qui, à coups de hausses des prélèvements sur les Berruyers (impôts, taxes, tarifs) a fini par rendre impossible ou inaccessible la vie à Bourges pour beaucoup de nos concitoyens. Enfin, il existe une imprévoyance, des atermoiements et des retards de votre part et de celle de vos amis sur un certain nombre de projets quâils soient économiques (je pense au développement des activités autour du risque ou encore à Lahitolle que vous promettez dans votre projet aux promoteurs immobiliers) ou dâaménagement de zones à construire dans le périmètre urbain. A cela, il faut ajouter le sentiment dâabandon ressenti par les habitants dâun certain nombre de quartiers de Bourges et notamment ceux des quartiers Nord. Très peu de réalisations depuis 9 ans dans ces quartiers, avec dans le même temps une dégradation de lâentretien. Une absence des élus de la majorité (au premier rang desquels le premier dâentre eux) dans ces quartiers. Des retards choquants pour certaines réalisations comme le centre culturel de la Chancellerie. Un office public HLM de la ville à la dérive complète, ballotté aujourdâhui quant à son avenir, ce qui ne manque pas dâinquiéter et les salariés et les usagers. Une zone franche urbaine qui nâa eu dâeffets quâà la marge de ces quartiers mais ni pour les habitants dont très peu ont bénéficié des retombées, ni pour lâactivité au cur de ces quartiers. Alors, bénéficiant de ce que lâon pourrait appeler lâeffet dâaubaine de la loi Borloo, vous proposez la mise en place dâun projet de renouvellement urbain durable. Un projet. Ce doit être un ensemble dâobjectifs et de moyens. Si jâen crois la délibération et le document annexé, votre ambition consiste à entériner une situation, à entériner ce que jâai appelé tout à lâheure le glissement de Bourges vers le déclin. Notre ambition nâest pas celle la. Votre document définit un certain nombre dâobjectifs que nous pouvons pour une part partager. Là où le bât blesse, câest quand les actions ou les aménagements prévus ne sont pas en adéquation avec ces objectifs. Par exemple, au plan économique, la nécessité de prévoir des activités au cur des quartiers Nord (et pas seulement en périphérie) et lâabsence dâespaces pour cela dans les plans dâaménagement proposés. Et puis, il y a la question des financements. Je ferai à ce propos quelques remarques. Dâabord le coût prévisionnel total de près de 300 Millions dâuros. Câest 10 fois le montant du budget annuel dâinvestissement de la ville (référence budget 2004). Ce coût est financé pour un montant de 125 Millions dâuros par lâANRU si le projet est retenu à ce niveau sachant que certains aspects du dossier déposé nâentrent pas dans le cadre strict des orientations de lâagence (je pense notamment à Avaricum). Le deuxième financement est constitué par lâemprunt à hauteur de 111 Millions dâuros. Câest un chiffre important, sachant que dans le même temps, la situation de lâOPHLM de la ville nourrit nos inquiétudes y compris concernant les emprunts garantis par la ville. Enfin, la ville apporterait 30 Millions dâuros ce qui peut sembler relativement peu proportionnellement mais représente beaucoup pour le budget municipal. Le renouvellement. Il passe essentiellement par la démolition avant dâéventuelles reconstructions. Câest la politique de « la table rase ». Je ne pense pas que ce soit la bonne. Non pas que des destructions ne soient pas nécessaires (surtout quand on a organisé la vacance voire la détérioration dâune partie du patrimoine) mais elles nécessiteraient du discernement pour éviter les gâchis, les gaspillages voire les erreurs. Dâailleurs 81% des financements sont consacrés aux démolitions /reconstructions contre 17% aux réhabilitations/résidentialisations. Dans ce domaine aussi, je pense que les habitants eux-mêmes auraient été les meilleurs conseillers. Durable. Jâai beaucoup de doutes à ce sujet. Je voudrais à ce propos vous rapporter les paroles de responsables associatifs ou dâhabitants des quartiers Nord que jâai réunis récemment pour étudier le document remis à la commission générale de janvier. « En fait, il faut démolir les HLM. En aucun cas cela ne peut résoudre les problèmes de nos quartiers : le chômage, lâéconomie souterraine, lâéchec scolaire ». « Dans ce projet, il nây a pas dâanalyse des causes profondes du mal-être : un taux de chômage énorme, des jeunes désoeuvrés dans des situations parallèles, un coût très cher pour quelque chose qui ne va pas attaquer la racine du mal ». Ce type de propos est corroboré par le rapport de lâun des enquêteurs de lâenquête sociologique, rapport qui vous a été envoyé et qui mâa été remis à cette réunion. La question posée est bien quelle est la priorité, est-ce quâune seule action sur le bâti constituera la durabilité de ce projet ? Je ne le pense pas. Monsieur le Maire, chers collègues, Oui, il y a à faire, oui il y a un besoin de projet de renouvellement urbain durable à Bourges. Mais Rien ne justifie la présence dâAvaricum dans ce projet Rien ne justifie les démolitions massives dans les quartiers Nord Rien ne justifie « lâabsence » des habitants dans ce projet, son élaboration, sa conduite Rien ne permet de déterminer la crédibilité des engagements financiers (y compris ceux de la ville de Bourges) présentés dans le dossier Toutes ces raisons nous fondent à voter contre cette délibération même si nous ne rejetons pas tout dans ce quâelle contient.
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Jean-Michel Guérineau
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