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Déclaration de Marie-George BUFFET, 26 janvier 2005
Célébrations de la Libération du camp dâAuschwitz
2 février 2005
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Il y a 60 ans, le soleil se levait sur Auschwitz, après des années de ténèbres. Des années à souffrir, des années à mourir, des années à ne plus savoir vraiment ce quâêtre homme et femme veut dire. Le jour où le soleil sâest levé sur Auschwitz, lâobscurité qui avait gagné le monde sâest dissipée. Il en reste cependant un voile sombre dans la conscience de lâHumanité. Plus, il en reste et il doit en rester le souvenir tenace. Des camps nazis, celui dâAuschwitz était le plus grand. Il est le nom que lâon retient lorsquâil sâagit de la monstruosité des crimes nazis. Des millions de femmes, dâhommes et dâenfants ont été assassinés dans ces camps. Au cours de son histoire, jamais lâhumanité nâavait été confronté à un tel degré de barbarie. « Pour la première fois, a dit André Malraux, lâhomme a donné des leçons à lâenfer ». On était, à Auschwitz, plongé au cur de cette inexprimable atrocité dâabord parce que lâon était juif, ou bien parce que lâon était tzigane. On y était aussi, plongé dans lâunivers concentrationnaire, lorsque lâon était militant de la liberté. Ce 27 janvier 1945, des milliers de rescapés restaient sur place, incrédules sans doute, brisés à coup sûr. Mais je veux me souvenir des propos de Marie-Claude Vaillant Couturier lors du procès de Nuremberg : « Dans les camps, nous avons vu comment des êtres humains pouvaient devenir des monstres. Mais nous avons aussi connu des hommes et des femmes qui ont su résister à cette entreprise systématique de dégradation quâétait le nazisme, qui ont su conserver leur dignité, rester sensibles, fraternels, solidaires, qui ont su rester en toutes circonstances des êtres humains dans le sens le plus noble ». Il fallait vivre dans les camps, il fallait résister pour être homme, être femme. Toutes les lumières nâétaient pas éteintes dans le camp. Il restait cette essence dâhumanité qui existe toujours et que lâon ne peut réduire. Les insultes qui salissent la mémoire de celles et ceux qui ont connu la barbarie nazie rappellent que le combat contre ce mal absolu nâest pas achevé, et sans doute quâil sera toujours un combat à mener. Un combat pour lâHumanité face aux crimes contre lâHumanité. Pour lâhumanité, câest à dire pour la liberté, lâégalité, la fraternité. Un combat pour le vivre ensemble. Un combat pour lâamour. Je ne veux pas oublier Auschwitz. Je ne veux pas oublier comment lâAllemagne en est arrivée là. Tout ce qui va à lâencontre de lâhomme et de la femme, tout cela nourrit la bête immonde, tout cela grossit de terribles menaces. On sait comment la situation de crise, de chômage, de misère et dâhumiliation nationale, que vivait lâAllemagne au début des années 30, a constitué un terreau fertile au nazisme. On sait les lâchetés qui ont accompagné cette montée, dont on peut penser quâelle nâétait pas fatale. On sait aussi lâisolement de celles et ceux qui se levèrent à son encontre contre. En France, allant jusquâà adhérer à lâantisémitisme nazi, le régime de Vichy sâest fait complice de cette infamie. On comprend alors le sens du mot « libération », et cette majuscule quâil a pris pour désigner la fin de la barbarie nazie. On comprend lâimmense espoir dâun monde nouveau qui y a puisé racine. On comprend les rêves en commun qui ont façonné nos sociétés les jours dâaprès et qui ont poussé leurs feux jusquâà aujourdâhui. Ces feux que lâon tente de réduire à grands renforts. Câest pour lâobscurité indicible et totale que je ne veux pas oublier Auschwitz. Et câest pour la clarté qui lâa anéantie. A lâheure de la mondialisation où est lâuniversel quâil faudrait voir surgir ? Le capitalisme impose une mise en concurrence sévère des peuples et des individus. La misère sâaccroît, le chômage grandit, le travail ne paie pas. Je mâinterroge souvent : les racines du mal ont-elles été extirpées ? Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas si le désespoir alimenté par la marche du monde le conduit de nouveau à la chute. Depuis Auschwitz, nous savons. Pour autant, il faut à chaque instant, opposer un combat acharné à la xénophobie, au racisme, à lâantisémitisme. Ce ne sont rien moins que des négations de lâhumanité. Et sâil faut se souvenir, câest parce que lorsquâils ont libre cours, nous sommes sur le chemin du camp nazi dâAuschwitz. Les communistes seront toujours arc-boutés dans ce combat. Alors commémorons. Officiellement, à grands renforts, commémorons. Mais aussi officieusement, pour ainsi dire : que cette commémoration soit celle de tout un peuple. Pour un peuple en quête dâavenir, il serait fou de ne pas regarder dâoù il vient. 26 janvier 2005 |
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